Étiquette : lecture

Lecture: Le pays de l’alcool

Je vous parlais en septembre dernier d’une lecture que j’avais beaucoup appréciée, Le Maître a de plus en plus d’humour de Mo Yan. J’avais beaucoup aimé ce livre, le premier de Mo Yan que je lisais. Je suis donc passée à un de ses livres un peu plus épais, Le pays de l’alcool.

Et j’ai beaucoup moins aimé… Si l’histoire est intéressante, avec un thème original et traité de manière également originale avec deux narrations en parallèle, je l’ai trouvé long long long.

Pour tout dire j’ai mis plus de deux mois pour le lire, quand je plis un livre qui me plait, même aussi épais, en une semaine…

Ce qu’en dit la quatrième de couverture:

L’inspecteur Ding Gou’er mène une enquête sur une rumeur de trafic de chair d’enfants dans la ville minière de Jiuguo… Très vite le réalisme survolté du récit s’empreigne de fantastique; le rêve fait irruption dans la réalité, et le héros intrépide, qui ne dessoule jamais, entre de plain-pied dans l’imaginaire immémorial de ce coin reculé de la Chine. En contrepoint, le narrateur livre sa correspondance avec un certain Li Yidou, apprenti romancier qui réside à Jiuguo, et dont les œuvres attisent le fantasme des festins d’enfants ou exaltent les vertus de l’alcool, viatique des Immortels. A la faveur de ce dispositif complexe et maîtrisé, l’auteur déchaîne sa verve satirique sur le mode du picaresque et du réalisme magique. Les morceaux de bravoure se succèdent et le texte devient une sorte de roman visionnaire: les enfants de Mao, initiés aux arcanes de l’éternité, retrouveront-ils le secret de l’âge d’or?

Vous l’aurez compris, je ne partage pas l’entrain des dernières lignes ci-dessus… Certes je trouve le thème du cannibalisme vraiment original et pertinent. La double narration, avec un ton-mi fictif mi-réaliste, permet de dissimuler la violence de ce thème, mais j’ai trouvé ce ton et l’articulation narrative trop complexe et trop difficile à suivre.

Et vous, qu’en avez-vous pensé?

Acheter sur Amazon: Le Pays de l’alcool

Lire la suite
Lecture: La Chine m’inquiète

J’avais envie de lire La Chine m’inquiète de Jean-Luc Domenach depuis sa sortie en 2008. Je viens de le finir et j’ai beaucoup appris… et je vous le conseille.

la Chine m inquieteL’auteur nous propose une photographie minutieuse de la Chine du début du 21ème siècle. C’est selon lui un moment clé de son histoire: le régime chinois actuel arrivera-t-il à perdurer et la Chine réussira-t-elle à conserver sa place dans le coleadership mondial? Même si le titre de son livre est alarmiste, Jean-Luc Domenach n’est pas si inquiet que ça! Il le dit lui même, le « titre est un peu au delà de ma propre pensée ». La question centrale du livre est plutôt: la Chine passera-t-elle l’épreuve de vérité qui l’attend?

A l’aide de beaucoup de données précises et chiffrées (peut-être trop à mon goût), l’auteur présente ce que la croissance économique a changé en Chine. Il se demande aussi et surtout ce qui changera si jamais la croissance ralentit vraiment.

Car la croissance a beaucoup fait évoluer les mentalités: les rapports pouvoir-société ont changé. La société repose aujourd’hui sur un pacte implicite: tant que la population améliore son niveau de vie, elle tolère son gouvernement et ses travers. Mais qu’adviendra-t-il s’il n’y a plus d’espoir d’amélioration de niveau de vie?… Pour essayer d’y répondre, beaucoup d’aspects du monde chinois sont évoqués: la Chine politique, économique, sociale…

Je vous conseille particulièrement la lecture du livre mis à jour de 2009, dans sa deuxième version. La postface est extrêmement intéressante et colle encore plus à la réalité du monde chinois, post J.O.

Par ailleurs, vous pouvez écouter une sympathique interview de J.-L. Domenach lors de la sortie du livre, chez Radio86.

Lire la suite
Tom & Jerry en chinois !

tom&jerry

Vous savez peut-être que de nombreuses bandes dessinées européennes sont traduites en chinois, Tintin notamment est assez réputé. Je suis tombée récemment par hasard sur Tom & Jerry traduit en chinois dans la librairie de Changzhou.

Grande surprise: ce cartoon incarne intégralement pour moi le pays de l’Oncle Tom et je ne m’attendais pas à le voir dans une librairie 100% chinoise… mais aussi et surtout heureuse surprise car, comme vous vous en doutez, les histoires ne sont pas trop dures à comprendre: c’est donc un très bon exercice pour l’étudiante en chinois que je suis. Le nom du célèbre cartoon américain est tout simplement traduit par 猫和老鼠 (Māo hé lǎoshǔ), le chat et la souris.

J’en discutais avec mon masseur, quand il m’a appris que Tom & Jerry était aussi diffusé à la télévision chinoise, et qu’il était n’était pas seulement traduit en mandarin mais aussi en dialecte, à savoir la langue du Sichuan. En même temps, quand on se dit que plusieurs dizaines de millions de personnes parlent cette langue, on comprend mieux pourquoi !

Lire la suite
Cinémas chinois

Amoureux du cinéma, sinophiles ou simples curieux, je vous recommande deux sources pour approfondir votre connaissance sur les cinémas de Chine.

– Le numéro 17 du Monde Chinois, Regard sur les cinémas chinois

cinemas-chinois

Dans ce numéro, la revue – dont je vous parlai il y a peu ici – essaie de donner une vue d’ensemble sur ce thème pourtant bien complexe: cinéma hongkongais, expression du cinéma majeure jusqu’à la rétrocession; exception taïwanaise; particularité du cinéma continental lié à l’histoire mouvementée de la Chine contemporaine… Les auteurs de ce dossier présentent un portrait « patchwork » et dynamique de ces cinémas: diversités des époques, des genres, des générations et des courants…

Enjeux esthétiques et économiques sont aussi au coeur des articles. Le cinéma chinois commençant à se libérer des carcans idéologiques dans les années 1990, quel développement pour ce cinéma encore très jeune dans une époque ultramondialisée? Quel modèle de développement pour ce 7ème art, entre blockbusters à la Hollywood et films intellectuels correspondant plus aux goûts des festivaliers occidentaux qu’au public chinois, dont l’oeil cinématographique est loin d’être formé?… Autant de questions pertinentes ici abordées…

Bien que les thèmes ce dossier soient un peu trop décousus tout en ayant quelques analyses trop pointues à mon goût, cette revue donne très envie de voir ou revoir de nombreux films chinois et donne aussi envie de découvrir des cinéastes encore peu médiatisés – même si je ne partage pas toujours le point de vue artistique des auteurs…

– Le site chinacinema.fr

Une autre riche source d’informations sur les cinémas de Chine… Même s’il n’est plus alimenté aujourd’hui, il comporte de nombreux articles, critiques, et interviews plus qu’intéressants, comme par exemple l’interview de Wang Xiaoshuai dont je vous conseille le très beau film Une famille Chinoise… Ce site est vraiment une mine de recommandations cinématographiques !

Vous l’avez compris, vous lirez très bientôt ici de nouveaux compte-rendus de films chinois !

Lire la suite
Lecture: revue Monde Chinois

archi-chineJ’ai découvert récemment une nouvelle revue Monde Chinois. Je viens de lire l’exemplaire intitulé Le renouveau de l’architecture en Chine.

Comme vous le savez, les destructions et reconstructions des villes chinoises sont un des thèmes récurrents de mes billets: j’ai toujours trouvé fascinantes ces constructions champignons, et Changzhou en offre un spectacle mouvant au quotidien.

J’ai donc été absorbé par la lecture de cette revue. Un dossier détaillé, écrit par des auteurs pointus de divers horizons, j’ai beaucoup appris sur l’architecture en Chine. Je trouve certains passages un peu trop pointus pour une novice comme moi, mais sur les 80 pages d’enquêtes, beaucoup de clés de compréhensions de ce qui fait le quotidien des grandes villes chinoises sont proposées. J’ai particulièrement été intéressée par un article où plusieurs jeunes architectes chinois sont interviewés: on apprend beaucoup sur leur travail et sur leur vision de la Chine, et même, question ô combien taboue, sur les dommages causés par la Révolution Culturelle.

Petit bémol: je trouve qu’un article sur la Shanghai contemporaine aurait été le bienvenu. La disparition du vieux Pékin a été largement abordée, mais la renaissance de la ville la plus cosmopolite de Chine durant ces 20 dernières années aurait selon moi mérité quelques pages d’analyse.

A la suite de ce dossier sur l’architecture, une quarantaine de pages sont consacrées à des sujets plus variés: questions géopolitiques, chroniques et reportages culturels, avec une large place consacrée à la spécificité taïwanaise.

D’une manière générale, j’ai apprécié cette revue : questionnements sur la modernité à la chinoise, place que l’Asie doit se créer dans la mondialisation pour qu’elle ne soit pas uniquement synonyme d’occidentalisation, incompréhensions culturelles Orient-Occident…. tous ces sujets qui sont au coeur de mes questionnements sont ici abordés de près ou de loin.

Lire la suite
Lecture: Le maître a de plus en plus d’humour

mo-yan Le Maître a de plus en plus d’humour est un très court roman de Mo Yan. On y suit les aventures de Ding Shikou, dit maître Ding: son usine a fait faillite, et il est licencié, sauf qu’il est seulement à un mois de la retraite. C’est tout un monde qui s’écroule… Jusqu’à ce qu’il retrouve le sourire avec une idée originale, qui ne lui apportera pas que de l’argent…

Le style de ce roman est simple, amusant et facile à suivre: on adhère totalement à l’histoire et on a envie de savoir où cette fameuse idée va mener le maître.

Mais ce livre est avant tout un triste tableau de la société contemporaine chinoise: on y devine les conditions de vie et de travail des ouvriers, d’autant plus injustes que l’on voit aussi celles de leurs patrons qui se rendent en Audi aux réunions de licenciement. Mo Yan propose un portrait de deux mondes qui coexistent en Chine: celui de la communauté, du respect des règles et de la dignité, et le nouveau monde mondialisé et individualiste.

Maître, je vais vous dire quelque chose de très moche: vous ne souffrez pas encore de la faim, mais le jour où vous serez affamé, vous serez que si l’on met dans la balance sa face et son ventre, c’est toujours le ventre qui l’emporte.

De son vrai nom Guan Moye, l’auteur a choisi le pseudonyme de Mo Yan, qui signifie “ ne pas parler ”… Né en 1955 dans une famille de paysans pauvres dans la province du Shandong, il quitte l’école pour travailler aux champs dès la fin de ses études primaires. Il a longtemps vécu au coeur de la campagne chinoise, dont le souvenir nourrit son oeuvre. En 1979, il s’enrôle dans l’armée et commence à écrire en 1981. Il a publié plus de quatre-vingt nouvelles et romans, des reportages, des critiques littéraires et des essais.

C’est le premier roman que je lis de Mo Yan, mais sans doute pas le dernier. Vous l’aurez compris: ne manquez pas la lecture de Le maître a de plus en plus d’humour!

*****

Je vous conseille le très bon interview de Mo Yan réalisé par Frédéric Joignot.

Acheter sur Amazon: Le maître a de plus en plus d’humour

Lire la suite
Lecture: Passagère du silence

Je viens de finir la lecture de Passagère du silence de Fabienne Verdier, et je vous le recommande chaudement !

Réflexions sur l’art, sur la transmission de la culture, sur la méfiance vis à vis de l’étranger… ces thèmes sont largement évoqués par Fabienne Verdier dans ce roman autobiographique.

pasagere-silenceRevenons à l’histoire: en 1983, une jeune étudiante française des Beaux-Arts se retrouve dans la province du Sichuan, dans une école artistique régie par le Parti, qui, comme toutes les écoles, est encore fortement marquée par la Révolution Culturelle.

L’auteur est déterminée à affronter tous les obstacles qui lui feront face  – méfiance des Chinois, administration, maladie… – et parvient à son but: devenir élève des grands lettrés, artistes méprisés mais détenteurs des codes d’un enseignement artistique millénaire. Elle passera 10 ans en Chine.

C’est un peu de l’enseignement qu’elle a reçu que Fabienne Verdier nous livre dans Passagère du silence. Elle retranscrit de nombreux échanges avec ses maîtres, nous initie à de nombreux concepts et modes de pensées qui dépassent souvent le seul cadre artistique et qui sont de vraies manières de voir le monde dans son ensemble.

Son regard, fruit de cette expérience si enrichissante, est vraiment fascinant et fait de ce livre un récit d’aventures, une voie d’accès à une initiation unique… Je termine ce billet en vous laissant apprécier ces quelques mots de Fabienne Verdier :

Je suis encore un de ces derniers peintres à croire encore avec ferveur à la transmission des puissances de l’esprit en un coup de pinceau.

Acheter sur Amazon: Passagère du silence : Dix ans d’initiation en Chine

Lire la suite
Lecture: Fleur de neige

Fleur de Neige de Lisa See est la fresque de la vie de deux femmes chinoises au cours du 19ème siècle : une magnifique histoire d’amitié, mais aussi un témoignage sur la triste place des femmes chinoises dans la Chine impériale.

fleur_de_neige

Fleur de Lys, la narratrice, d’origine paysanne, et Fleur de Neige, d’origine aristocratique, sont nées la même année, le même jour, à la même heure. Elles sont « laotong », âmes sœurs pour l’éternité. On suit leur destin croisé pendant  400 pages : l’ascension sociale de la première et la déchéance de l’autre. En dépit des difficultés de la vie, leur amitié perdurera …

Ce livre est une ode à ces deux femmes chinoises : on découvre la force et la beauté de leur caractère malgré  leur position sociale inférieure, en tant que femmes, elles se considèrent elles mêmes comme des « branches inutiles », dont l’ultime but dans la vie est d’avoir des fils.

Lisa See est d’origine chinoise, elle est née à Paris et vit aux Etats-Unis. Elle s’est rendue dans la province du Hunan, où le récit se situe, et a mené une enquête auprès des vieilles femmes de la région. Ce livre a une très grande valeur documentaire sur la place des femmes dans la Chine impériale.

On y découvre le « nu shu », ou écriture secrète des femmes, qui lie les deux héroïnes pendant tout le récit. Il s’agit d’une langue écrite et chantée uniquement utilisée par les femmes Yao. En effet, dans la Chine féodale, les femmes n’avaient pas accès à l’éducation et étaient condamnées à l’isolement social. Le nu shu se serait transmis de mère en fille dans des régions rurales coupées du monde. Croyant les femmes inférieures, les hommes ne se sont pas intéressés à ces codes secrets qui sont ainsi restés inconnus pendant des siècles, jusque dans les années 1960.

La tradition des pieds bandés est aussi au centre de ce livre. Véritable torture qui a perduré jusqu’aux années 1960, cette tradition a mutilé des milliers de femmes : on leur bandait les pieds quand elles avaient moins de 10 ans pour obtenir des « lys dorés » qui ne devaient pas dépasser la dizaine de centimètres. Cette pratique les condamnait à rester cloîtrer chez elles toute leur vie en plus des souffrances insoutenables qu’elles subissaient pendant 2 à 3 ans (le temps que tous leurs os se brisent). La lecture du chapitre qui traite du bandage des pieds de l’héroïne m’a touchée au plus haut point : un témoignage rare reflétant une douleur subie par les femmes chinoises pendant plusieurs siècles.

Fleur de neige est un fascinant voyage dans la Chine du 19ème siècle, un livre instructif et touchant à la fois, à découvrir !

Acheter sur Amazon: Fleur de neige

Lire la suite