Le Sahara tunisien : vivre un rêve de désert éveillé…
Juin 29, 2022 Tunisie 2

J’aurais pu vous raconter les mille et une péripéties de l’envers de l’écriture d’un guide de voyages. Je le ferai peut-être. Les réveils à 5 ou 6 h du matin, les couchers 18 ou 19 heures plus tard, après une longue journée de découvertes couplée de sessions d’écriture à l’hôtel. Les acteurs du tourisme qui se battent envers et contre tout. Les regards parfois lourds d’hommes sur une femme voyageant seule. Les beautés des sites antiques. L’attitude aberrante de certains touristes qui ne verront jamais de la Tunisie que la plage et les serveurs lisses des bars des hôtels-clubs. Les bleus magiques de la mer. Les journées d’écriture qui s’enfilent encore et encore…

Mais je choisis plutôt de vous ouvrir les pages de mon journal de bord. Ces lignes ne concernent que les derniers jours de mon voyage, où j’ai arpenté les déserts du Sud Tunisien. Ces quelques journées, six pour être précise, resteront je le sais à jamais gravées en moi.

Douz : la gratitude.

Samedi – L’instant pourrait-il être plus parfait ?
Un morceau de mon cœur est déjà attaché à Douz et sa région.
Tant et tant et tant d’instants magnifiques. Deux jours et demi que je suis là et l’impression d’y avoir des amis pour la vie. Je ressens le profond besoin de poser, laisser décanter même un peu les instants de magie vécu ici. J’ai pleuré et encore ce matin. Tant d’émotion, tant de beauté, tant de sincérité.
Je suis touchée en plein cœur par la beauté des paysages et par l’humanité immense, sans bornes des hommes rencontrés ici. Des hommes à l’image de leurs paysages. Beaux, intenses, sincères, et qui ne connaissent pas de frontières.

Gratitude absolue. Joie intense et tristesse de repartir déjà. Des larmes encore. Joie et gratitude. Je pourrais noircir le carnet entier de ce dernier mot.
Assise à l’ombre d’un restaurant pour digérer, consigner, laisser décanter ce qui doit l’être.
Confiance absolue en la vie, en l’instant présent, cet infini présent.

Tentons de consigner donc ces purs présents…
L’arrivée jeudi matin à Douz. Jour de marché.

Douz : des troupeaux de moutons et de chèvres en vente, les pieds dans le sable, la tête sous les palmiers. Des hommes du désert déjà autour.

Des hommes majestueux dans leurs chèches blancs, crème et ocre. Plus haut dans la ville, la place principale et une grande rue animée. Beaucoup d’hommes, peu de femmes. Ils sont pour beaucoup drapés dans leurs chèches, je suis résolument ailleurs. Ces cinq hommes jouant au domino, assis en semi-tailleur, à même le sol, l’un en chapeau de paille, les autres enturbannés, concentrés sur leur jeu, des mathématiques presque. Un tableau que je n’ose fixer sur ma pellicule.

Je me rends au El Bey Restaurant. Ce ne seront que surprises sur surprises. Des paons m’accueillent majestueux, peu farouches. Une cour juste pour moi. Première impression de toute beauté. La seconde impression sera plus belle encore… Sadokh, le propriétaire, l’âme des lieux, m’accueille dans le premier éclat de rire d’une longue série. Il porte avec beauté et fierté des habits traditionnels et un chèche blanc, ses yeux semblent soulignés d’un trait de henné.
Il ne nous faudra que le temps d’un thé pour connecter. Il présente son lieu avec tant de cœur, que je lui ouvre le mien, sans autre préambule.
Ce ne seront qu’échanges de cœur à cœur, discussions profondes et éclats de rire.
Ce n’était pas prévu mais je reviendrai le voir deux fois.
Le lendemain, il m’emmène dans un de ses lieux de prédilection, Zaafrane l’Ancienne : il souhaite partager avec moi son « refuge » de quand il est en ville. Quelques bâtisses d’argile laissées à l’abandon, à demi ensablées, des palmiers sauvages, et partout le sable blanc. Tout est beau.

Dans le désert : arrivée en visiteuse, repartie en amie.

Je rejoins Ahmed, un homme du désert, pour le départ vers le Sahara, aux alentours de Tembaïne. Ce soir je dors chez lui, au Campement Abdelmoula. J’ai tellement désiré cette immensité depuis 2012, dix ans plus tôt, alors que je n’en avais eu que quelques bribes, que je n’ai même osé y penser ou le fantasmer.
L’envie était trop brûlante, je n’ai même osé la convoquer, la déception d’une projection non réalisée aurait été insoutenable.

La réalité n’a été que magie.
Arrivée en visiteuse, repartie en amie.
Partager le Sahara, sa beauté absolue, le coin du feu, les thés aux amandes, les histoires de vie, les dons de chacun.
Donner un peu, recevoir intensément.
Gratitude incarnée que ces jours partagés.

Je suis touchée en plein cœur.

Bribes intensément vécues dans l’immensité du Sahara :

*l’émotion si forte du premier regard sur les dunes, dix ans plus tard
*la majesté absolue du lever de soleil, le silence inégalé
*la joie de partager mon magnétisme avec Ahmed, Ali et Abdala
*l’amabilité parfaite des hommes du campement Abdelamoula
*le joueur de flûte sur le lever de lune, au campement Dunes Insolites
*les yeux rieurs de Mouhamed mon chauffeur devenu ami quand on danse ensemble pour la première fois
*la joie de danser autour du feu avec des inconnus l’instant d’avant, sans fard ni fausse pudeur, la magie opère. Des chants sincères aussi sans retenue ni arrière-pensée. L’âme agit…
*la balade en dromadaire tôt le matin, je tangue et m’émerveille

Nayer est un autre homme du désert chez qui j’ai séjourné une seconde nuit. Je découvre sa sincérité totale le lendemain matin lors de la visite du village de Sabria l’Ancienne. Son amour pour ce lieu, sa volonté de préserver les forces de son héritage. Sa passion pour les si sensibles dromadaires sur lesquels il m’apprend tant.

L’aube sur Sahara m’inspire ces quelques mots, lâchés à chaud :

Juste avant

Vibrer le silence
Abasourdie par sa majesté
Pleurer le silence

Silencieuse pureté
Clarté bleutée
Douceur froide et sablée

Guetter le décisif instant
Du levant
Un téméraire ailé fend le silence

Le rose d’abord
Après, l’or
Envahit l’azur

Un autre oiseau répond
Quelques dunes plus loin

Les couleurs transmutent le paysage
Sable fondu en or, bleuté léger
Une barre rose envahit les dunes
Exactement juste avant

Rire et pleurer
En même temps d’absolu, de bonheur, de gratitude

Le premier rayon darde l’horizon
Le sable s’orange
Les ombres se marquent

Le soleil est franc
Les ombres estompées
Le sable est or

Je ne le sais pas encore mais bien des beautés m’attendent encore au-delà du Sahara…
>> la suite de ce récit se trouve ici <<

***

Un immense merci à Ahmed et Nayer pour m’avoir introduite à « leur » désert et à Adel M., Mouhamed F. et Saber G. sans qui la création de ce guide (et donc ce voyage) n’aurait pas été possible.

Des liens utiles :
*Campement Abdelmoula dans le Sahara avec Ahmed
*Campement Dunes insolites dans le Sahara avec Nayer
*El Bey Restaurant à Douz

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2 comments on “Le Sahara tunisien : vivre un rêve de désert éveillé…

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