Je rentre donc d’un long et bon week-end passé à Alicante, dans le Sud de l’Espagne. Quelle joie de vivre un bout de vie de mon amie… Loin des idées pré-conçues et des parcours touristiques, je partage avec elle son simple quotidien, ses joies, ses doutes.
La situation économique est pire que ce que je pouvais imaginer. En témoigne cette réponse à mon anodine question:
« Et toi, comment vois-tu ton avenir? »
« No future… »
Ce No future résonne et va résonner encore longtemps en moi. Je connais bien mon amie, son énergie de vie, sa bonne humeur et son esprit positif. Ce No future est loin d’être anodin, facile ou tombé par hasard dans la conversation. Il est le résultat d’années de galères, de projets avortés, d’espoirs déçus, de lendemains qui déchantent les uns après les autres.
Je reste bien sûr sans réponse. Avec seulement des picotements dans les yeux, tant je suis émue pour mon amie.
Elle me raconte ses années d’études, ses différentes reconversions et l’époque où elle avait encore l’espoir que cela serve à quelque chose. Les deux petits boulots qu’elle cumule à ce jour, les 100€ d’essence mensuelle pour parcourir les kilomètres de l’un à l’autre, alors que son salaire cumulé est loin d’atteindre notre SMIC national. Sa nouvelle formation, commencée alors qu’elle sait qu’il y a peu de chances qu’elle lui ouvre un quelconque avenir radieux. Et la vie chez ses parents, du haut de ses 30 ans. Bien sûr que ça l’énerve et qu’elle a eu envie d’en partir, elle a alors regardé les petites annonces et s’est estimée contente de pouvoir vivre chez eux.
Et puis, la vie qui reprend, toujours. Les chouettes petits moments, entre amis et famille. Tant qu’ils n’ont pas eu ça, les c*** d’en haut, ceux qui tirent les ficelles, qui jouent avec les économies de nos vies comme avec les fins fils de marionnettistes, tant qu’ils n’auront pas ça, tout ne sera pas perdu…
Car le pouls espagnol c’est aussi et surtout cela: une convivialité inégalée en Europe, de longues heures passées en terrasse à papoter de ce qui ne va pas donc, mais aussi des mille et uns petits riens qui font que la vie va toujours. De longues heures à échanger, moins légèrement qu’il y a quelques années certes, mais avec une fougue et une énergie de vivre inébranlées.
Et même s’il n’y a plus de demain, les petits présents sont bien là et comptent plus que jamais.
C’est touchant… Et grave. Comme tu le dis, heureusement qu’il y a toujours les moments simple de la vie desquels on sait se contenter. C’est ce qui fait vivre beaucoup de personne sur la planète !…
A+ !
Angoissant… Difficile d’entendre une jeune femme de 30 ans qui n’a pas l’espoir d’un avenir meilleur, qui jongle avec des petits boulots pour vivre, qui ne peut pas construire sa vie… La crise touche fortement l’Europe, surtout l’Espagne et la Grèce pour le moment. Il manque l’énergie générée par l’espoir !
Enfin, merci de terminer ton article sur une note positive 🙂
@ Bruno: c’est clairement commun à beaucoup de gens sur notre Terre – mais c’est généralement plus du côté des « Suds » et moins par chez nous. De voir cette situation chez « nous », ça fait forcément quelque chose.
@ Sylvie: comme on dit tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir, mais j’avoue qu’il m’a fallu y réfléchir un peu – cet article aurait pu se résumer en les deux phrases que j’ai mises en guillemet ci-dessus…
Oui, je vois ce que tu veux dire. C’est amusant, j’étais tombé sur une étude économique sur les « Suds ». Très intéressante. Il s’agissait de l’impact du climat sur l’économie d’un pays.
Comme l’a dit Sylvie, c’est un élans d’énergie qu’il manque. J’espère qu’il finira par arriver, surtout chez nous.
Cet espoir qui génère de l’énergie, et qui donne l’impression que le pays est en marche est bien plus présent dans des pays émergents. La vieille Europe est bien triste…
Se raccrocher aux petits bonheurs de la vie toujours. En espérant que l’avenir de l’Europe s’éclaircisse un peu…
@ Luce: justement j’en parle plus en détails demain… et oui, gardons l’espoir que cela aille mieux, et en attendant, cultivons au mieux les petits « présents »!
Les mesures d’austérité ne font pas que du bien en Europe c’est clair.
Après comme tu dis, l’Espagne a l’avantage du soleil et également la solidarité familiale qui est très forte, ça aide un peu !
Ce « no future », 90% des Espagnols et des Italiens que j’ai pu rencontrer sur la route le partageaient … C’était d’ailleurs la raison même de leur départ, bien souvent, très tristement. Lorsque j’étais au collège/lycée, je me suis toujours demandé ce que ça ferait de vivre la récession de 1929 – eh bien, en rencontrant ces mecs en vrai de vrai, j’ai vraiment plus du tout eu envie … Merci pour le témoignage, simple et direct.
Pas de quoi Chris… C’est vraiment touchant, surtout quand ça vient de quelqu’un à qui tu tiens.
Je comprends tout à fait ce que tu as pu ressentir! Je vis à quelques kilomètres de l’Espagne et je m’y rend très souvent, c’est incroyable la différence culturelle entre deux pays comme l’Espagne et la France qui sont si proche l’un de l’autre.
J’adore l’Espagne, j’adore les gens, la mentalité, la culture. On se rend pas compte de la gravité de la situation là bas. Les espagnols essayent de faire face, ils profitent de la vie au jour le jour alors qu’en France on se plaint pour un oui ou pour un non.
J’ai dit à un ami espagnol »on dit que c’est la crise en Espagne mais les gens continuent de sortir, les terrasses des cafés sont pleines » et il m’a répondu »un café ca ne coûte même pas 2 euros et ça nous fait oublier les problèmes pendant un moment, le temps d’un match du barca ou d’une discussion entre amis on ne pense plus à la crise ou à ce qui va se passer demain »
Ca fait bizarre quand on te dit ça, j’espère que ca va vraiment s’arranger pour eux !
Merci Nadège pour ce témoignage, qui est bien dans la lignée de ce que j’ai pu ressentir…