En début d’année, je suis partie en tournée dans le Grand Sud-Marocain pour mettre à jour le guide Petit Futé. A nouveau, ce fut un voyage superbe, empli de nombreuses rencontres et découvertes.
Je vous ouvre aujourd’hui les pages de mon journal de bord…
Belle lecture, belles découvertes !
Jeudi, depuis Ksar Massa
Je viens d’arriver dans la région d’Agadir et déjà, tant de surprises – comme par exemple :
*l’explosion de saveurs, une fois le tagine d’Al Baraka goûté… Rarement tant apprécié un plat
*le bleu du ciel tout le jour
*les pieds dans l’océan à Taghazout puis Agadir – je me sens lavée de mes dernières si lourdes émotions
*l’Anti-Atlas si sec… qui me rappelle un peu mon cher Dahar
*arrivée de nuit à Ksar Massa. Un bruit si fort. Une usine? Un barrage? L’océan face à moi – je ne le vois, mais je reconnais enfin son son.
*l’alphabet amazigh, partout sur les panneaux.
Vendredi, face à l’océan
Je me sens énergisée et régénérée par l’océan, je ne pensais pas qu’il me ferait tant d’effets.
J’ai demandé à l’océan qu’il me lave et me purifie de toutes mes tristesses, de toutes mes peurs – il semblerait qu’il y soit arrivé. C’est si appréciable de tremper pieds et jambes dans cette fraîcheur et douceur salée en plein hiver. Je me recharge, je me régénère, je le sens littéralement.
Et ce bleu si intense du ciel, ce soleil si chaud. Gratitude immense pour ce nouveau départ, cette nouvelle mission.
État d’esprit avant de partir : « je suis ouverte à tout et ne m’attends à rien », ce mantra reçu lors d’un de mes derniers voyages et qui m’accompagne. Il semble à nouveau effectif.
Plus tard, juste après le thé
Journée résolument tournée vers l’Océan. Sa capacité à me recharger restera une surprise du voyage.
Je roule vers l’adresse Nid d’Aigle sur la recommandation d’un ami de mon chauffeur. Je suis peu motivée pourtant, nous avons encore trois heures de route avant de finir cette journée déjà très longue. Nous nous y rendons quand même, et heureusement : le site est superbe, porte parfaitement son nom.
Arrivée tout en haut de la longue route qui serpente au cœur des montagnes, je suis magnétisée par l’aire de décollage. Les gens semblent voler avec une telle douceur dans leur parapente. J’aimerais bien en faire, je ressens énormément d’empathie pour ceux qui volent, mais le temps me manque tant. La route est si longue avant d’arriver ce soir.
Je cherche la propriétaire du lieu. Elizabeth est très avenante, semble sans chichis. Elle me présente les activités dont le baptême en parapente en biplace. Moi : « J’aurais tant aimé ». Elle : « Mais vous êtes là, vous pouvez essayer. Il reste un peu de vent. »
Je retarde le départ. Me voilà déjà avec Ibrahim sur la piste de décollage. L’océan superbe devant nous, entre lui et nous, une vaste plaine de sable et de rocaille.
Lui : « Tu me suis, je te guide », et je n’ai même pas le temps d’avoir peur, déjà la légèreté, la fluidité, la beauté infinie sous nos yeux, l’air sur mes jambes nues, je suis en robe ! Je vois le flanc de la montagne, tout près, tout près. Je tends mes bras, me sens oiseau. Tout est tellement doux et léger. Je flotte. Je vole. Je suis là. Je suis pur présent.
Ce cadeau est si inattendu. Pure présence. Para-chance, para-présent, para-beauté, para-bonheur.
Dimanche
De retour vers Paris. Déjà déjà. Étrange tournée réalisée en « kit », bien malgré moi, mais en raison des violences que je subis encore. Malgré cela, je ressens une intense culpabilité pour mon impact carbone. À moi de faire avec cette tournée uniquement du carbone utile et non pas du carbone futile. Je me promets de rendre hommage par mes mots à chaque découverte, rencontre ou paysage.
Hier matin, Taroudant. Me voici dans le Maroc intérieur. Loin du Maroc tout tourisme.
La ville est belle, ceinte de ces superbes remparts historiques datant de plusieurs siècles. Ce qui me plaît ? La vie « normale » des Marocains. Le peu de touristes. La beauté des murailles et ses pépites cachées – j’y flânerais bien une journée entière – et les deux incroyables Riads que je côtoie avec Abderrahim.
Je dors au Riad Tafilag. Décoré en finesse, entre tradition et élégance. Trois étages, pleins de coins et recoins. Je viendrais bien y écrire des jours entiers, à l’ombre de cette terrasse, avec le son de la médina er des oiseaux. Dar Tourkia aussi me touche. Adossée au rempart, plus vaste encore, avec un incroyable jardin et une superbe terrasse. Là aussi, je me verrais bien écrire des heures et des heures.
Abderrahim me touche lui aussi. Deux heures de visite où je sens qu’il veut si bien faire. Je dois déjà partir alors que j’aurais tant aimé flâner plus longuement avec lui.
Tioute – surprise par la fraîcheur de la partie palmeraie. Et par sa verdeur, si surprenante en cet Anti-Atlas désertique. J’y passe vite, trop vite, et subis presque un coup de chaud. Je reprends la route, j’écourte une visite, trois heures de route pour un seul lieu, je suis trop fatiguée.
J’arrive à 17h30 à la chambre d’hôte Paradis Nomade. Quelle surprise que le récit de vie livré par Emma, la si touchante propriétaire. Chaque rencontre peut-être en voyage.
Joie que cette tournée. Joie des rencontres : Amal, la Suisse-Marocaine de Ksar Massa ; l’équipe, à peine entrevue du Nid d’Aigle, mais déjà appréciée : Elizabeth, Ibrahim, avec qui je vole, son cousin, Rachid ; Abderrahim de Taroudant ; Emma et sa famille.
Intensité. Fatigue. Mais ressourcement de l’océan et du soleil. Joie des surprises et joie d’apprendre tant aussi.
Vendredi, depuis Dar El Malara
Superbe Anti-Atlas marocain.
Je suis en train de tomber amoureuse de la région.
Je ressens d’excellentes énergies depuis que j’ai pris la route hier en fin de matinée. La montagne me parle, ou peut-être m’ancre, me ravit.
Je ressens une évidence à son contact. Proche de ce que je ressens dans le Dahar tunisien. Force. Ancrage. Beauté. Immensité. Chaleur. Douceur…
Je me rappelle que je suis fille de la terre, plus que fille des océans. Je me sens bien.
Arrivée avec très peu de sommeil, mais avec une foi absolue.
Je me laisse agir par Dieu. « Que ta volonté soit faite » et non pas celle de mon ego.
Et la force géologique de l’Anti-Atlas…
Merci mon Dieu.
Plus loin, au pied de l’Anti-Atlas
Une énergie tellement forte. Au creux de la Terre mère. Je dois faire un avec elle. J’honore un engagement, mon engagement : m’en remettre à Dieu. Me laisser agir par Dieu. Être au service, tout le temps, tout entière. Faire un avec la Terre-mère.
Samedi, depuis le Campement Akka Naïd Sidi
Une incroyable surprise. Campement en pleine nature, posé au cœur de la terre si puissante, ces roches et montagnes superbes.
Surprise, car je n’avais pas réalisé où j’allais, même si c’est moi qui ai réservé.
Quelle joie que ce travail et ses découvertes.
Nous sommes seuls, mon guide, mon hôte et moi. Calme absolu, beauté époustouflante, énergie, tellurique, si puissante, si douce, si revigorante à la fois.
Perfection de l’étape.
Dimanche, depuis le toit de l’Homme Bleu
Les paysages superbes encore hier tous les jours. Si puissantes montagnes. La magie et la créativité de la Terre, courbes géologiques, fascinantes, inédites et incroyables.
Beaucoup de route. Des pépites et autres adresses trouvées en chemin.
Balade de deux heures entre gorges oasiennes et agadirs anciens, ces greniers collectifs fortifiés.
Coup de cœur pour Brahim et sa maison familiale au cœur de la si belle palmeraie de Tighmert. Je me sens si bien ici… La culture saharienne est là, palpable. Je suis chez moi.
Lever de soleil sur la palmeraie avec le rose qui gagne de branche en branche à chaque instant. Les oiseaux autour s’agitent. À part eux, calme et sérénité absolue.
Dans l’avion…
Qu’est-ce qui coule dans mon sang ? Je me sens sœur de tant d’hommes ou femmes, proche d’une humanité toujours plus vaste.
Dans l’oasis de Tighmert, je me sens tellement bien, tellement proche de la culture saharienne, tellement proche du Sahara. Tellement chez moi.
Et ce matin, dans le petit musée, si modeste, d’Abdou, plutôt un amoncellement d’objets, un lieu de mémoire si important, dans ce musée, je me retrouve face à des « fers d’esclaves ». Pour la première fois de ma vie, je pense. Et je fais ce lien inédit jusqu’alors. Le Sahara me fascine, les caravanes du désert me fascinent – et là je vois le lien : j’aime le Sahara, sa culture, sa beauté, ses hommes. Et j’aime tout autant l’Afrique de l’Ouest, sa culture, ses hommes. Et ces fers d’esclaves font le lien entre les deux. Une des plus grandes horreurs de l’humanité fait le lien entre les deux plus cultures de l’humanité les plus chères à mon cœur.
Quel paradoxe. Et en même temps, l’ombre et la lumière ne sont-elles pas toujours réunies ? Les deux faces d’une même pièce.
Je sens que je suis loin de saisir pour ce qui se joue ici. Mais quelque chose de majeur se joue ici, se dénoue ici en moi, se noue peut-être.
Coup de cœur absolu que ces quatre jours de tournée. Surprise sur surprise. Force tellurique immense. Joie géologique en tout genre. Culture saharienne et beauté oasienne. J’espère y revenir avec plus de temps.
Je ne suis que gratitude pour ces jours-ci déjà… et d’autres sont à venir !
Un immense merci à Emmanuelle de l’agence Authentik Traveller : elle m’a soutenue pour l’organisation de ma tournée pour la mise à jour du guide Petit Futé Grand Sud Marocain et a rendu ces découvertes possibles…
Merci pour ce récit touchant et d’une humanité criante. La vulnérabilité à fleur de mots fait du bien à l’âme. Merci âme voyageuse et lumineuse✨
Merci infiniment pour ces mots qui me touchent chère Nadia ! Merci d’avoir pris le temps de les écrire…