Il est des noms qui marquent une histoire. Tiananmen est de cela. Si vous vivez sous des latitudes démocratiques, vous aurez nécessairement en tête l’image de cet étudiant debout face à une colonne de chars.
Je n’ai pas vécu cet événement, j’avais 6 ans à l’époque, et j’ai commencé à m’intéresser et à voyager en Chine quand j’avais 22 ans.
J’ai par contre une très chère amie journaliste qui a eu la chance d’être au bon endroit au bon moment. Laure Guilmer*, alors reporter pour une radio régionale, a pris l’initiative de venir en Chine en 1989, pour découvrir cette culture et parfaire son apprentissage du chinois. Elle a vécu de l’intérieur cet événement déterminant dans l’histoire contemporaine de la Chine.
J’ai connu Laure en 2010, quand je vivais à Shanghai, elle était venue en Chine pour couvrir l’Exposition universelle de Shanghai. J’y vivais alors.
Laure m’avait contactée grâce à mon blog, avec ces lignes : « Je passe 4 semaines en Chine en février. C’est pour moi un repérage journalistique : je souhaite rencontrer des gens qui préparent l’exposition universelle de Shanghai, j’ai envie de faire une chronique des 6 mois de l’exposition ». Je ne le savais pas alors, mais cette personne allait devenir une amie, que je retrouve toujours avec plaisir, près de 10 années plus tard !
La parole aux Chinois.e.s
Je viens donc de terminer la lecture de son livre La Française de Tiananmen et ce fut pour moi un excellent moment de lecture. On y suit l’aventure de Laure en 2019, qui revient à la rencontre de ses amis chinois qu’elle n’a pas vus depuis 30 ans.
Par sa narration, Laure nous offre une double lecture de la Chine contemporaine. Elle partage d’une part son témoignage, rare, d’une Occidentale ayant vécu les mouvements étudiants chinois du printemps 1989. En parallèle, elle donne la parole à ses amis, aujourd’hui presque tous quinquagénaires et toujours installés en Chine.
C’est rare d’écouter des Chinois.e.s raconter leur quotidien. On entend souvent la parole des officiels, parfois la parole des artistes ou des exilés politiques, rarement ou jamais la parole d’un.e simple habitant.e de la Chine d’aujourd’hui. Avec ce blog, j’avais donné la parole à des Chinois.e.s rencontré.e.s, dans mes Portraits de Chine à retrouver derrière ce lien ( si le coeur vous en dit!).
Avec La Française de Tiananmen j’ai pu à nouveau entendre des Chinois.e.s s’exprimer, avec simplicité et humanité sur leur quotidien.
Ils et elles ne sont pas là où on les attend, la liberté et la démocratie ne font partie ni de leur récit ni de leurs préoccupations quotidiennes. Mais donner la parole à la société civile chinoise, n’est-ce pas leur ouvrir la voie vers ces valeurs qui nous sont si chères ?
Ces pages m’ont permis de repartir en Chine, m’ont très donné envie d’y repartir…
Je ne peux que vous en conseiller la lecture, ami.e.s sinologues ou simples curieux.ses !
Extraits de La Française de Tiananmen
Voici ce que dit Laure sur la quatrième de couverture :
J’ai vécu par hasard un événement qui a fait trembler la Chine. Et le monde. C’était en 1989. Pendant cinquante jours, j’ai vécu avec les étudiants de Pékin l’occupation quotidienne de la place Tiananmen. La contestation s’est terminée dans un bain de sang le 4 juin 1989. Sous mes yeux.
En 1989, mon année chinoise ne s’est pas arrêtée au fracas de Tiananmen. Elle s’est poursuivie pendant six mois dans les provinces chinoises, au milieu de leurs habitants. Cela fait trente ans. Cela semble loin. Mais il est impossible d’oublier.
J’ai voulu marquer cet anniversaire. Je suis retournée à Pékin en 2019. J’ai confronté ma mémoire des événements à celle de mes amis de l’époque. Ces amis qui m’avaient accompagnée cette année-là. Retrouver les lieux et les amis perdus de vue a permis de faire renaître les souvenirs et les liens noués en 1989. Mais au fil des rencontres, j’ai aussi pu comprendre la Chine de 2019. Une Chine où tout a changé.
Si vous préférez une version vidéo, voici l’interview de Laure, empruntée sur le site de son éditeur
Et enfin, c’est par là pour se procurer le livre La Française de Tiananmen.
*Laure Guilmer est un nom d’emprunt. Cela lui permet à la fois de protéger ses contacts et de se protéger elle, en prévision d’autres voyages en Chine.
Merci pour cette référence. Certainement un excellent moyen de découvrir la Chine de l’intérieur avant d’y projeter un voyage !
Ravie que cette référence te parle ! N’hésite pas à repasser ici une fois la lecture terminée !