On ne va pas se leurrer, le monde ne va pas dans le bon sens. J’ai longtemps, très longtemps, depuis toujours peut-être, été une idéaliste chevronnée. Pour ne pas dire que je me berçais d’illusions. Ma vie personnelle et l’époque m’apprennent et me rappellent chaque jour que non, le monde ne va pas dans le bon sens.
J’ai été biberonnée, éduquée et façonnée par les idées de progrès, de croissance toujours possible, de construction européenne ou de culture Erasmus, j’ai si longtemps pensé que le monde et les choses allaient forcément dans le bon sens… la désillusion a été dure et l’est encore parfois. Ce n’est pas évident tous les jours. J’ai très souvent la gueule de bois de notre époque.
Faute de continuer à vivre avec ce naïf idéalisme chevillé au corps, je reste une indécrottable optimiste. Et, malgré les effondrements que je vis les uns après les autres, j’essaie de faire ma part.
Vous avez été très nombreux à me dire être touchés par mon article « J’ouvre ma porte aux moins que rien : pourquoi je soutiens Utopia 56. » et je vous remercie infiniment de m’avoir partagé ces retours, cela contribue à m’engager plus encore dans mes mots.
J’ai un jour entendu, dans l’excellent podcast Zeteo, le philosophe Denis Marquet s’exprimer à propos de Mamoudou Gassama, ce Malien devenu célèbre en 2018, après avoir escaladé quatre étages d’un immeuble parisien pour sauver un enfant agrippé à un balcon. Le philosophe expliquait que cet homme n’est probablement devenu assez courageux pour réaliser cet exploit dans l’instant. Il disait peu ou prou ceci : probablement, Mamoudou Gassama a-t-il tout au long de sa vie fait des petits choix qui l’ont mené ce jour-là à faire preuve de beaucoup de courage. Probablement, a-t-il tout au long de sa vie réalisé de petits actes de courage ordinaire, de petits actes de solidarité ordinaire, qui l’ont mené à agir aussi grandement pour cet enfant.
Et aujourd’hui je m’adresse à moi-même, comme je m’adresse à vous chers lecteurs : n’est-il pas urgent de muscler notre muscle de la solidarité ? Probablement, en réalisant de petits gestes de solidarité ordinaire, comme accorder un regard ou un sourire à un sans-abri, s’indigner et prendre position face à un acte de racisme ordinaire, financer ou soutenir une cause qui nous semble juste, manifester pour plus d’humanité, ou tout autre petit geste, qui ne nous coûterait pas tant mais qui musclerait en nous ce fameux muscle.
Poser de petits actes de solidarité, car peut-être un jour très prochain aurons-nous besoin de beaucoup plus de courage. Et ce jour-là rien ne tombera du ciel, si nous n’avons pas pris le temps de muscler ce courage, cette solidarité ou cette humanité en nous…
Quand j’étais jeune, à cette même époque où ma croyance que notre monde ne pouvait qu’aller vers le progrès battait son plein, j’avais été marquée par « Né en 17 à Leidenstadt » cette belle chanson de Jean-Jacques Goldman où il s’interrogeait « Et si j’étais né en 17 à Leidenstadt, Sur les ruines d’un champ de bataille, Aurais-je été meilleur ou pire que ces gens, Si j’avais été allemand ? » Je me demandais après mes cours d’histoire, aurais-je été du côté des Résistants ou bien du côté des Français qui ont laissé faire tant de choses sans rien dire ?
Certains passages résonnent particulièrement aujourd’hui « On saura jamais ce qu’on a vraiment dans nos ventres / Caché derrière nos apparences / L’âme d’un brave ou d’un complice ou d’un bourreau ? / Ou le pire, ou le plus beau ? / Serions-nous de ceux qui résistent ou bien les moutons d’un troupeau / S’il fallait plus que des mots ? »
Jamais au grand jamais, pendant les 40 premières années de ma vie, alors que j’ai 42 ans aujourd’hui, je n’aurais cru que cette question s’avérait autre que philosophique, pour ne pas dire décisive. Je pense qu’elle l’est aujourd’hui.
Je pense que chacun d’entre nous, chacun qui me lit aujourd’hui, chacune des personnes qui se révèle chaque jour un peu plus touchée, choquée ou sidérée par une actualité toujours plus inhumaine, chacun d’entre nous doit se poser cette question : serons-nous de ceux qui résistent ou bien les moutons d’un troupeau ?…
Les liens vers la chanson de Jean-Jacques Goldman et vers le podcast Zeteo.
Crédit photo : Noah Buscher / unsplash.
Je muscle mon muscle de la solidarité depuis 3 ans : planté 1000 arbres pour chaque chaque course en tunisie du coup ça fait 3000 arbres puis 10 cartables pour une association pour les enfants défavorisés dans un village pas loin de Tozeur. c’est tout doucement … mais surement. des fois je me retrouve seul dans une action et dans d’autres avec des amis et famille pour soutenir mes toutes petites actions de solidarités <3